La Belgique revoit ses recommandations alimentaires en 2025, avec un tournant plus végétal, plus durable, et plus préventif. Un cas d’école qui révèle l’évolution des politiques nutritionnelles en Europe – et les implications concrètes pour les entreprises du secteur agroalimentaire, ingrédients compris.
Et si les recommandations alimentaires étaient les nouvelles boussoles du secteur agroalimentaire ? Bien plus qu’une affaire de santé publique, elles influencent désormais les politiques agricoles, les cahiers des charges de la restauration collective, les stratégies d’innovation produit… et les récits de marque.
Le dernier avis du Conseil Supérieur de la Santé (CSS), publié en juin 2025 en Belgique, en est un exemple frappant. Il actualise les repères nutritionnels pour la population belge adulte, à la lumière des données scientifiques les plus récentes. Mais il dessine aussi les contours d’une transition alimentaire assumée – aux antipodes de certains dogmes nutritionnels d’hier.
Une nouvelle génération de recommandations : ce qui change
Loin d’une simple mise à jour, le document du CSS acte un changement de paradigme : la lutte contre les maladies chroniques devient le prisme central de toute recommandation. Exit l’approche purement calorique ou micro-nutritionnelle. Place à une logique systémique, qui lie santé publique, durabilité et comportements sociaux.
Les principales évolutions : moins de viande rouge et de charcuterie, plus de légumineuses, céréales complètes, légumes et fruits à coque ; restriction explicite des aliments ultra-transformés, une première dans le contexte belge ; hiérarchisation des aliments selon leur impact sur la morbidité et la mortalité ; mise en avant des modèles alimentaires durables, ancrés dans la réalité sociale et culturelle.
« Le message est clair : l’alimentation n’est pas seulement un carburant, c’est un levier de santé publique. »
Tableau récapitulatif des recommandations-clés (CSS 2025)
Recommandation | Objectif quantifié |
Céréales complètes | ≥ 125 g/jour |
Légumineuses | Plusieurs fois par semaine |
Fruits frais | ≥ 250 g/jour |
Légumes | ≥ 300 g/jour |
Fruits à coque non salés | 20–30 g/jour |
Produits laitiers | 250–500 ml/jour |
Poisson (dont poisson gras) | ≥ 200 g/semaine |
Œufs | ≤ 1 œuf/jour |
Viande rouge | ≤ 300 g/semaine |
Charcuteries | < 30 g/semaine |
Boissons sucrées | À réduire au maximum |
Sel (toutes sources) | ≤ 5 g/jour |
Eau (boisson principale) | 1–2 L/jour |
Alcool | Ne pas dépasser 10 unités/semaine |
Aliments ultra-transformés | À réduire drastiquement |
Une transition structurelle, pas juste individuelle
Ce type de recommandations engage bien plus que les citoyens : elles influencent directement les leviers structurels de l’alimentation:
- Restauration collective (écoles, hôpitaux, entreprises),
- labels et certifications (Nutri-Score, Planet-Score, labels durables),
- stratégies agricoles (soutien aux filières végétales locales),
- grande distribution
- innovation produit (reformulation, enrichissement, nouvelles matrices) : tous les maillons de la chaîne sont concernés.
Ces recommandations sont aussi un signal adressé aux industriels : les politiques publiques évoluent vers des standards nutritionnels plus stricts, plus lisibles et plus cohérents avec les enjeux sanitaires et climatiques.
Dans ce contexte, les marques d’ingrédients ne sont pas de simples exécutantes techniques. Elles deviennent des partenaires de transition alimentaire. Concrètement, cela signifie :
- valoriser les matrices végétales sous-utilisées (pois, fèves, lentilles, sorgho, fonio, légumineuses fermentées…),
- offrir des solutions clean label et technologiques (réduction du sucre, du sel, remplacement des graisses saturées),
- réduire les niveaux d’ultra-transformation (stabilisants naturels, procédés doux, fermentation),
- participer à la relocalisation des approvisionnements (sourcing local ou régional).
Pourquoi ce modèle va inspirer d’autres pays
La Belgique n’est pas un cas isolé. Ces recommandations s’inscrivent dans un mouvement de fond observé en Europe. La France prépare une refonte de son PNNS plus axée sur la durabilité. L’Allemagne renforce les messages sur les aliments végétaux dans ses communications publiques. Le Danemark a intégré des critères environnementaux dans ses recommandations dès 2021. À terme, ces lignes directrices convergeront vers un modèle européen cohérent, centré sur la santé préventive, la souveraineté alimentaire et la transition écologique.
Conclusion : s’adapter, c’est anticiper
Les nouvelles recommandations belges ne sont pas une exception nationale. Elles sont le reflet d’une mutation globale. Pour les entreprises du secteur alimentaire – et en particulier les acteurs des ingrédients – c’est le moment d’aligner leur discours, leur R&D, leur sourcing et leur stratégie d’innovation avec ces nouveaux référentiels.
Et vous, votre portefeuille ingrédients est-il prêt pour répondre aux politiques nutritionnelles de demain ?
Source
Conseil Supérieur de la Santé, Avis n°9805-9807, juin 2025